NOTES ET LIENS:
Les Voix de la Tech, épisode 11 !
Également disponible en version intégrale sur Apple Podcasts.
Présentation : Benjamin Vincent et Fabrice Neuman.
Au programme : M6 a diffusé, la semaine dernière, la toute première bande-annonce TV, générée par l’intelligence artificielle. C’était pour E=M6, l’émission de vulgarisation scientifique, avec un clone de Mac Lesggy. Une auto-promo bluffante rendue possible par une start-up française, Argil : Laodis Menard, son co-fondateur est notre 1ère voix de la Tech.
Après avoir raté les révolutions du mobile et de l’intelligence artificielle, lntel traverse une période difficile. Son PDG, Pat Gelsinger, vient de quitter son poste. Alors, peut-on sauver le soldat Intel ? Frédéric Crassat, ingénieur chez Orange et expert de l’industrie des micro-processeurs, nous aide à comprendre la crise en cours.
Et puis, notre 3è voix de la Tech, c'est Nicolas Gaume qui a co-fondé Space Cargo Unlimited et qui vient de dévoiler la Bentobox dont le lancement est prévu en décembre 2025. Elle deviendra la première usine dans l’espace où l’absence de gravité fait rêver certains industriels. Et ne manquez pas, dans la version intégrale, les détails au sujet de son autre entreprise, Orbite, qui prévoit de former les apprentis astronautes à l'occasion de stages de quatre jours, de l'Antarctique à Paris en passant par l'Arabie saoudite....
🎧 Version intégrale : apple.co/4dVkHWV
Habillage musical par Eddy Gronfier (Twitter / X - Spotify)
Lire la transcription ci-dessous
(Attention, cette transcription est réalisée par une IA et peut contenir de erreurs)
Bonjour, ici la voix de Fabrice Neman.
Et ici la voix de Benjamin Vincent, c'est l'épisode 11.
Bonjour et bienvenue à chacune et chacun d'entre vous.
Les voix de la tech chaque vendredi, en moins de 30 minutes, c'est l'actu tech décryptée par les voix qui la font.
Et si vous en voulez davantage, la version intégrale avec les interviews en entier, vous attend sur Apple Podcast.
M6 a diffusé la semaine dernière la toute première bande annonce à la télé, générée par l'intelligence artificielle.
C'était pour E=M6, l'émission de vulgarisation scientifique, avec un clone de Mac Lesggy, plus vrai que nature.
Mac Lesggy qui s'est bien prêté à l'expérience en se laissant filmer pendant trois minutes pour entraîner l'IA.
Le résultat, une auto promo bluffante, rendue possible par une startup française, Argil, déjà repérée par l'incubateur qui a lancé Airbnb et Twitch notamment.
Laodis Menard, le cofondateur d'Argil, sera notre première voix de la tech dans un instant.
Intel, vous connaissez, PC ou Mac, on a tous eu un ordi avec un Intel Inside, comme disait la pub.
Oui mais voilà, après avoir raté les révolutions du mobile et plus récemment de l'intelligence artificielle, le géant de Santa Clara traverse une période bien difficile.
Oui Benjamin, tellement même que son PDG Pat Gelsinger vient de quitter son poste dans des conditions plus que floues.
Démission volontaire, départ à la retraite forcé, alors qu'il n'a que 63 ans, personne ne le sait.
Et signe de l'instabilité des temps chez ce mastodonte qu'on croyait pourtant indestructible tellement il existe depuis longtemps, le successeur n'est pas encore désigné.
Alors, peut-on sauver le soldat Intel ?
On en parle avec Frédéric Crassat, ingénieur chez Orange et expert de l'industrie des microprocesseurs.
Et puis notre troisième Voix de la Tech cette semaine va nous faire décoller vers une orbite à 500 km de la surface de la Terre.
Nicolas Gaume, pionnier du jeu vidéo il y a 30 ans avec Callisto, a cofondé Space Cargo Unlimited et il prépare le lancement de Rev1, la première usine dans l'espace, où l'absence de gravité fait rêver certains industriels, notamment dans le domaine des cellules souches ou des nouveaux matériaux.
Mais avant cette mini navette spatiale, la prochaine étape c'est la BentoBox, un mini laboratoire qui reviendra sur Terre entouré d'un coussin gonflable comme un airbag pour traverser les couches de l'atmosphère.
Lancement prévu dans pile un an, Nicolas Gaume va tout nous raconter.
- Bonjour Laodis Ménard.
- Bonjour Benjamin.
- Depuis les Etats-Unis, vous avez passé beaucoup de temps l'été dernier, je crois, argile.ai, c'est votre site internet.
Si on a eu envie que vous soyez une de nos voix de la texte cette semaine, Léodis, c'est parce que vous avez participé à la fabrication d'une autopromo, d'une bande-annonce pour M6 qu'on a pu découvrir il y a quelques jours.
Bande-annonce pour E=M6, l'émission présentée par Mac Lesggy.
Qu'est-ce qu'elle avait cette bande-annonce ?
- Effectivement, ce qu'on fait chez argile, c'est des avatars IA, des clones vidéo. On prend quelqu'un, et à partir de quelques minutes de vidéo de cette personne, on crée son clone vidéo avec lequel, sur notre plateforme, on va pouvoir lui faire dire des choses qu'il n'a pas dit dans la vraie vie.
L'objectif, c'est de réduire les coûts de production parce que c'est très cher.
À partir de quelques minutes de vidéo, on peut faire des heures de vidéo de cette même personne.
Effectivement, on a été approché par M6 pour faire le clone de Mac Lesggy, le présentateur de E=M6, dans le cadre de leur bande-annonce, et aussi parce qu'on présentait notamment notre outil et l'implication qu'a le futur des technologies comme les nôtres sur l'écosystème de la production de la vidéo et de la tech.
- On va en parler dans un instant.
Laodis, je vous propose qu'on regarde cette autopromo d'E=M6, c'était il y a quelques jours sur M6.
Cette semaine, E=M6 vous emmène dans le futur.
Et vous allez voir que notre vie quotidienne va être chamboulée.
Les voitures conduiront toutes seules, des imprimantes high-tech fabriqueront de délicieux gâteaux, voire même bâtiront des maisons.
Tout cela sera possible grâce à des scientifiques au cerveau ultra développés, comme le mien. D'ailleurs, dans le futur, les terriens voudront tous me ressembler et la Terre s'appellera la MacPlanète.
- Hop, hop, hop, on se calme. Alors, je vous rassure, ce n'est pas moi qui vous parlez, mais mon avatar fabriqué par l'intelligence artificielle.
Vous allez voir comment cette technologie va révolutionner notre avenir.
- Des voitures autonomes, des imprimantes high-tech et l'intelligence artificielle.
E=M6 spécial futur, dimanche à 20h25 sur M6 et en streaming sur M6+.
- Ça a l'air de rien, mais c'était une première à la télé, en tout cas en France.
Une vraie petite révolution, l'air de rien sur M6 il y a quelques jours, non ?
- Oui, parce qu'on est les seuls en France et même en Europe à faire une technologie de cette qualité, ce qu'on appelle "state of the art", c'est-à-dire qui est la meilleure qu'on a aujourd'hui.
- L'état de l'art, oui.
- Pour information, aujourd'hui, on est capable de générer des vidéos, quand on les envoie à des gens sans leur donner le contexte, ils ne font pas la différence, ou ils ne remarquent pas en tout cas que c'est une IA.
Donc pour moi, ça avait un double rôle de contribuer à ce projet avec M6.
Le premier, c'est de présenter l'état de la technologie et les futurs potentiels.
Le second aussi, c'était de rassurer sur le fait qu'avec notre plateforme notamment, il n'y a pas de possibilité de mal utiliser la technologie, parce qu'on fait très attention à la manière dont les gens se clonent et à qui peut se cloner.
- Car justement, comment vous faites ? Est-ce que vous mettez l'outil à disposition, et après, chaque utilisateur en fait ce qu'il veut ?
Est-ce que vous avez un droit de regard sur chaque vidéo ?
Deepfake, parce qu'on peut les appliquer comme ça, que vous générez, comment ça se passe ?
Comment vous contrôlez ce qui se passe ?
- En général, on évite d'utiliser ce terme parce qu'il est très mal personnalisé.
Deepfake, dans la tête des gens, ils pensent à un deepfake d'homme politique ou une chose comme ça.
Nous, sur la plateforme, on doit envoyer deux vidéos pour faire son clone.
La première, c'est une vidéo, où la personne doit faire certains gestes, parler d'une certaine manière.
Et la seconde, c'est une vidéo de consentement, où la personne doit filmer elle-même en lisant un texte qu'on génère sur la plateforme à ce moment-là.
Et c'est cette vidéo de consentement sur laquelle on a effectivement des checks qui sont techniques, et des checks qui sont humains pour s'assurer que c'est une vraie personne, que ce n'est pas une personnalité publique, que ce n'est pas une personnalité qui a été deepfakée, ça nous est arrivé récemment.
- C'est-à-dire ?
- Il y a quelqu'un qui allait faire un clone d'une autre personnalité avec une autre plateforme, et qui a essayé de s'en servir pour faire une vidéo de consentement pour passer les tests.
- Et ça a été bloqué ?
- Oui, ça a été bloqué.
Et on a appris que c'était d'ailleurs un ingénieur en cybersécurité qui était en train de faire un benchmark du marché sur la sécurité des différentes solutions, et du coup on avait passé son test avec succès.
- Ça veut dire que votre système garantit que toutes les vidéos qui vont être générées le sont par ceux qui sont représentés, et donc avec leur accord, c'est ça ?
- Ou alors qu'ils ont les droits de le faire.
Par exemple, on a des agences qui vont faire ça pour leurs clients, ou pour certains de leurs acteurs, mais à chaque fois on doit s'assurer qu'ils ont les droits.
- Donc j'imagine que Mac Lesggy a dû se prêter au même exercice, comment ça s'est passé avec lui, concrètement ?
- Oui, alors dans son cas, on est même allé le filmer en direct dans les locaux de M6, donc effectivement, on a fait nous-mêmes la vidéo d'entraînement, donc on n'a pas eu besoin de la vidéo de consentement puisqu'il était là physiquement, mais effectivement on y est allé, ça a pris peut-être une demi-heure tout compris, on lui a fait faire tous les gestes qu'on voit, il se met à la vidéo dans la bande-annonce, et ça nous a permis d'avoir du matériel qui est exploitable, on pourrait faire d'autres vidéos avec lui, on pourrait quasiment présenter un E=M6 avec son avatar aujourd'hui.
- Alors comment vous êtes parti de cette matière pour arriver aux images qu'on voit dans votre promo ?
Parce que notamment, on le voit faire des gestes un peu comme un pantin désarticulé, est-ce que ça c'est une commande, un prompt en fait, que lui ou que vous avez envoyé pour que justement son avatar fasse ces gestes qui font comprendre que ce n'est pas vraiment lui, parce que c'est très réaliste quand même ?
- Oui, alors aujourd'hui on ne peut pas inventer des gestes, c'est-à-dire qu'il faut que dans la vidéo qu'on nous envoie d'entraînement, les gestes qui apparaîtront dans l'avatar existent déjà d'une certaine manière, parce qu'en fait, et d'ailleurs c'est un sujet, on nous pose souvent la question sur l'authenticité, on nous dit "mon avatar c'est pas authentique", en fait un avatar est très authentique parce qu'on clone le plus proche possible et la voix et la manière de parler et les dents et jusqu'au poil de barbe et les mouvements d'une personne qui sont ses mouvements d'origine.
On n'en invente aucun, on n'invente pas sa manière de parler, des choses comme ça, certaines autres plateformes inventent complètement des expressions et d'ailleurs les gens disent que ça ne les ressemble pas forcément, donc nous on colle vraiment à la personne le plus possible.
- Ça a pris donc une demi-heure de tournage à M6, et ensuite la génération du résultat qu'on voit à l'antenne, alors je ne parle pas des autres plans qui sont dans l'autopromo, mais en tout cas les images du vrai faux Mac Lesggy, vous les avez obtenues en combien de temps ?
- Donc une fois qu'on a la vidéo d'entraînement, on la passe dans notre modèle, on entraîne donc son clone, ça prend quelques heures, en général 4 à 5 heures, c'est quelque chose qui va drastiquement réduire l'année prochaine, et ensuite une fois que son clone est actif, pour chaque vidéo qu'on fait, ça nous prend à peu près 5 minutes de génération, donc on tape un script et on a une vidéo 5 minutes plus tard.
- Combien ça coûte concrètement de faire une vidéo de 2 minutes avec son avatar en passant par Argil ?
- Aujourd'hui notre compte le moins cher sur la plateforme, il est autour de 30 euros par mois, on peut faire 3 versions de son clone, on est 3 personnes différentes, et on a à peu près 25 minutes de vidéo, donc pour moins de 30 euros, on peut déjà commencer soit à faire du contenu pour les réseaux sociaux, soit à faire du contenu éducatif.
LinkedIn a lancé ses shorts récemment, donc c'est un des usages qu'on voit le plus aujourd'hui.
- Ça vous a surpris qu'une chaîne comme M6 vous contacte dans ce projet-là, ou c'est typiquement ce que vous attendiez, ce que vous espériez ?
- M6 était les premiers, mais aujourd'hui on a beaucoup d'autres chaînes qui nous ont contactés pour faire des tests dans ce sens, et pour essayer de se positionner sur le futur.
Alors ça m'a un peu surpris, oui, mais je savais qu'ils ont une équipe d'innovation très top, et je me suis rendu compte qu'ils étaient très avancés sur le sujet, ils avaient testé tout un tas de choses côté IA, donc en fait je me rends compte que ça bouge beaucoup.
- En même temps, est-ce que vous avez conscience que c'est un sujet sur lequel tout le monde n'est pas très à l'aise ?
Parce que ça bouleverse beaucoup de choses, ça bouleverse beaucoup d'habitude, il y a peut-être des métiers qui se sentent un peu menacés, comment est-ce que vous le sentez ?
- Bien sûr, je pense que toute technologie de rupture va avoir de la méfiance d'une manière ou d'une autre, et c'est bien normal, c'est pour ça que je dis que un de mes gros rôles, notamment quand je parle à la presse, ce que je leur explique, c'est que ça ne va pas remplacer leur journalisme, par contre ça va leur permettre de créer plus de valeur avec du contenu qu'ils ont déjà fait et qui leur coûte cher.
Donc moi j'essaie toujours d'expliquer que c'est plutôt un gain qu'une problématique aujourd'hui.
Donc je pense que dans tous les écosystèmes, il y a des gens qui sont inquiets, mais il y a aussi d'autres qui disent que ça peut être une super opportunité pour moi de faire beaucoup plus avec les moyens que je leur donne.
- Par exemple, les Voix de la Tech, on est deux, Fabrice et moi, si on voulait faire un teasing ou plusieurs teasings pour chaque épisode, il faudrait donc qu'on vous envoie les vidéos dont vous m'avez parlé, ça veut dire qu'on porterait les mêmes vêtements toute l'année, vous pouvez aussi changer, transformer mon polo en chemise blanche ou bleue.
- Effectivement, l'année prochaine, on va y rendre possible de changer ses habits, mais aussi de faire des gestes qu'on n'a pas forcément dans la vidéo d'entraînement, et voilà, être beaucoup plus créatif avec son avatar.
- OK, Laodis Ménard, merci pour votre participation aux Voix de la Tech, et à bientôt. - Merci beaucoup.
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- Bonjour Frédéric Crassat. - Bonjour Fabrice.
- Bonjour Benjamin. - Bonjour Fred.
- Merci d'avoir accepté d'être une de nos Voix de la Tech cette semaine.
Alors, on va le dire tout de suite, on se connaît, parce que tu passes souvent une tête dans notre autre podcast, iWeek, la semaine Apple.
Tu es ingénieur formation responsable de l'apprentissage et développement à l'école des métiers techniques d'Orange, mais tu es aussi spécialiste et passionné des processeurs, et c'est pour ça qu'on a souhaité te faire venir, plutôt pour commenter une nouvelle qui touche de près ce domaine, le départ à la retraite de Pat Gelsinger, le PDG d'Intel.
Alors, certains parlent même d'un départ à la retraite un peu forcé, plus que souhaité par l'intéressé, et c'est peut-être un signe des difficultés traversées par Intel.
Il y est depuis 1979 chez Intel, et il n'est pas remplacé tout de suite, il est remplacé indirectement, temporairement par trois personnes, le temps de trouver un nouveau président.
Et du coup, est-ce que tu penses qu'on peut, il y a moyen d'imaginer qu'on puisse sauver le soldat Intel ?
Oui, oui, je pense qu'on peut sauver le soldat Intel, ne serait-ce que parce que c'est un symbole, ouais.
Donc, c'est carrément notre histoire, c'est les premiers microprocesseurs pour ordinateur, et ils ont vraiment de très très bonnes équipes et un vrai savoir-faire.
Au début, c'était tout microprocesseur, donc ils n'étaient que sur le microprocesseur, que ce soit le design et les usines de fabrication.
Moi, je l'ai connu comme vous, avec le 386, les processeurs pour PC qui étaient vraiment taillés, après il y a eu le Pentium, mais avant il y a eu le 386, 486.
Intel, c'était vraiment l'ordinateur, et puis la puce, ils étaient raides.
Après, ils ont voulu faire des cartes réseau, ils ont voulu faire d'autres choses, et ça n'a pas été des succès, même s'ils avaient des moyens colossaux à leur disposition, les échecs, ça coûte cher, et ça s'est multiplié vraiment au cours de ces années, dans les années 2000, ça s'est beaucoup accentué, notamment pour le bénéfice d'NVIDIA, ne serait-ce que pour la partie GPU, qu'ils n'ont pas pu enrayer, et qu'ils n'ont pas vu venir.
Alors, qu'est-ce qui reste à Intel dans ce monde des processeurs en pleine mouvance ?
Alors, Intel réagit quand même, parce qu'Intel, dans les futurs processeurs d'Intel, on va avoir arrivé ces neural processors unit, ou on les appelle les NPU, donc c'est un peu comme des cœurs graphiques, mais vraiment optimisés pour les tensors, qui est le calcul matriciel de l'intelligence artificielle.
Oui, justement, on a eu l'impression pendant plusieurs décennies que Intel avait un monopole sur le marché du PC, certes, il y avait le Mac qui avait quelques pourcents, on ne pouvait pas faire deux pas dans la rue sans avoir une pub avec un PC et le logo Intel, et la petite musique Intel aussi.
Oui, tout à fait, d'ailleurs, cette petite musique, tu te rappelles, ça faisait "tadam", etc., et puis le petit logo.
De toute façon, AMD existait, mais très faiblement, donc de toute façon, en entreprise, et puis sur la plupart des PC, c'était vraiment le duo Intel.
Il faut comprendre que Microsoft et Intel étaient vraiment un duo, c'était vraiment quelque chose de très fort, on fabriquait Windows avec les puces Intel, et les deux arrivaient souvent ensemble, etc., ça fonctionnait très bien.
Il faut comprendre que la culture d'Intel, c'est le processeur, le processeur, le processeur.
C'est leur histoire, et ils n'ont pas vu arriver cette partie GPU, et le problème, c'est que la double peine par rapport aux GPU, c'est que ces mêmes GPU, qui sont construits différemment qu'un processeur classique, c'est plutôt du calcul parallèle, vont servir à l'intelligence artificielle.
Il semble qu'Intel a donc raté ce marché-là, tu viens de l'écrire, mais est-ce qu'on peut même parler d'un manque de compétence ?
Parce qu'il y a eu petit à petit des développements de processeurs graphiques intégrés aux processeurs classiques, pour essayer de proposer quand même un peu d'une partie graphique un peu boostée sur les processeurs Windows, sur les PC ou Intel, comme tu évoquais tout à l'heure.
Mais à chaque génération, il y avait une petite amélioration, mais les capacités graphiques de ces ordis à processeurs graphiques intégrés n'étaient quand même pas terribles.
Il y a des choix stratégiques qui viennent d'une histoire, d'une culture, et c'est vrai que ça se paye très très cher après, c'est très difficile à rattraper.
Tu dirais qu'ils se sont un peu endormis sur leur laurier ?
Alors je ne sais pas s'ils se sont endormis, parce que je n'y suis pas.
C'est plus la culture d'entreprise, les personnes qui ont des convictions et qui ont des fois du mal à voir que ça change.
C'est vrai que c'est difficile pour des gens, c'est une famille Intel, donc c'est difficile pour les gens qui ont toujours rêvé de faire le meilleur processeur du marché, et ça a été le cas, de faire le meilleur processeur du marché, et de se dire que la mobilité nous demande de changer, la mobilité nous demande de la partie GPU, la partie IA, tout ça nous demande de penser différemment.
Fabrice disait de manière très courtoise qu'il avait décidé de prendre sa retraite.
En fait, le conseil d'administration l'a brusquement déclaré à la retraite, avec effet immédiat, donc c'est une décision assez violente.
Est-ce qu'il y avait urgence à créer un électrochoc pour toi, Fred ?
Non, je pense qu'Intel avait besoin de stabilité, mais ça montre qu'on est en crise.
Aujourd'hui, qui sont pour toi les grands concurrents d'Intel ?
Alors les grands concurrents, un petit peu Qualcomm, parce qu'ils arrivent sur le marché du PC, et c'est le marché d'Intel encore.
C'est quand même une très belle boîte, ils vendent encore beaucoup de puces dans les PC.
Donc Qualcomm est le concurrent, et celui qu'il va falloir surveiller, c'est Nvidia.
Merci beaucoup Frédéric Crassat d'avoir accepté notre invitation dans les Voix de la Tech cette semaine.
Un grand plaisir de vous y retrouver.
A bientôt, ici ou dans iWeek.
Salut Fred, merci Frédéric, à bientôt.
A bientôt.
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Bonjour Nicolas Gaume.
Bonjour Mme Vincent.
Bonjour Nicolas.
Bonjour Fabrice.
Un plaisir de t'accueillir dans les Voies de la Tech, Nicolas.
Pour ceux qui ne savent pas, tu es une légende de la Tech en France.
Oui, tout a commencé pour toi avec Callisto. On est en quelle année Callisto, Nicolas ?
C'était il y a longtemps, c'était en 1990.
Donc le jeu vidéo, un peu les débuts.
Aujourd'hui, si on se retrouve, pour notre plus grand bonheur, c'est parce que tu as lancé un projet qui va déboucher, si tout se passe bien, en orbite, dans grosso modo un an.
C'est Space Cargo Unlimited.
Tu vas nous expliquer et puis on parlera aussi d'Orbit, cette autre société pour laquelle tu viens de lever 4 millions d'euros.
On va commencer par Space Cargo Unlimited, Nicolas, parce que l'échéance approche.
Est-ce que tu peux nous rappeler quel est l'objectif et quel est le timing en cette fin 2024 ?
Space Cargo Unlimited, notre mission, c'est fabriquer dans l'espace des produits à haute valeur ajoutée pour la Terre.
On a annoncé en 2022 un projet qu'on développe aujourd'hui qui s'appelle REV1, qui est un véhicule spatial entièrement automatisé, dont nous sommes concepteurs et propriétaires et dont nous sous-traitons une grande part de la fabrication à Thalassania Space, qui a une vraie expertise de premier plan dans la fabrication de véhicules spatiaux.
Ils ont fait un véhicule qui s'appelle IXV pour l'Agence Spatiale Européenne, qui a volé en 2015.
On est parti de cette base, on l'a réinventée pour produire le véhicule IDOANE et faire une vraie usine spatiale qui soit capable d'accueillir différents clients, jusqu'à une vingtaine dans des domaines qui seront aussi divers que l'agriculture, les sciences de la ville, l'industrie pharmaceutique, l'électronique, les nouveaux matériaux, entre autres.
Ce projet coûte beaucoup d'argent, le véhicule spatial avance bien, mais prend du temps.
Et clairement, au sein de ce véhicule, à l'intérieur de ce véhicule, on a une infrastructure qu'on développe en interne, le Space Cargo Unlimited, qui s'appelle la Bento Box.
Comme dans un restaurant japonais, une Bento Box, c'est un plateau dans lequel vous mettez différents plats, la Bento Box, c'est l'infrastructure qui permet d'accueillir les unités de production qui vont fabriquer les médicaments de demain, les nouveaux matériaux, en utilisant cet environnement qu'on ne peut pas recréer sur Terre, qui a l'absence de gravité, et d'autres paramètres aussi, mais surtout celui-là.
Unité de production, c'est à la taille d'une imprimante, de bureau, vous voyez à peu près, et on peut fabriquer une fibre optique, par exemple, on a des clients qui fabriquent une fibre optique qui s'appelle Ziblane, qui est une fibre à base de fluor, plutôt que de silice, qu'on peut difficilement fabriquer sur Terre, mais très facilement dans l'espace, et cette fibre est 100 fois plus conductrice sur certaines fréquences, donc elle a beaucoup d'intérêt de retour sur Terre.
Il y a des médicaments, parce que les cellules souches se développent beaucoup plus vite, donc on peut développer des médicaments. Là, on a des clients qui vont voler avec nous, qui développent des organoïdes, donc un des premiers composants qui pourra demain nous permettre de fabriquer aussi des organes. On a un prospect avec lequel on travaille, qui veut développer des cornets pour des yeux, un autre qui veut développer de la peau pour aider des grands brûlés à pouvoir retrouver une vie plus normale en greffant leur propre peau qu'on aurait développée dans l'espace.
Voilà, tout un tas de scénarios qui sont absolument incroyablement puissants, c'est ce qui nous fait dire que la prochaine révolution industrielle aura lieu dans l'espace, c'est les infrastructures. Donc cette bento box qui permet, qui est en fait la valeur ajoutée de ce véhicule spatial, qui a tous les sous-systèmes, réfrigération, contrôle à distance, des unités de production automatisées, gestion de température, gestion des vibrations, parce que les phases de vol, notamment le retour sur Terre, sont très complexes, tout ça on l'a développé chez nous, entre Bordeaux et le Luxembourg, et cette technologie-là, on va la faire voler dès l'année prochaine.
Donc la bento box qui sera dans Rev1, elle fera 1 tonne et 1200 litres, celle qu'on fait voler l'année prochaine, elle fera 100 kilos, 240 litres, et elle accueillera 5 clients, là où celle de Rev1 qui est plus importante, fera une vingtaine de clients. Mais ce sont des clients opérationnels, et ce qu'on fait voler l'année prochaine, c'est vraiment le début de l'exploitation.
On a un client italien qui va développer des organoïdes, c'est une biotech, on a un client allemand qui va développer des mécaniques, des senseurs lasers industriels, des agents spatials, on a une entreprise qui va fabriquer des nouveaux matériaux, et tout ça ce sont des gens qui veulent fabriquer pour vendre derrière et qui ont besoin de cette infrastructure.
Quel engin spatial va emmener la bento box vers une orbite ?
Alors c'est pas tant l'envoyer, c'est surtout la ramener en fait.
Donc ce que Rev1 permet c'est de revenir sur Terre comme un avion, avec un bouclier thermique, un peu comme la navette spatiale le faisait en son temps.
Donc c'est ça Rev1, et ça le fait d'une manière dans de très bonnes conditions, douce, retour léger, mais pour pouvoir aller plus vite, de manière plus agile, et en fait on est vraiment une start-up dans le sens où on rampe, on marche, on court, on avance par étapes, et on a eu la chance de rencontrer cette entreprise allemande qui s'appelle Atmos, qui fait un bouclier thermique gonflable, donc imagine une sorte de airbag qui entoure notre bento box, et qui après deux semaines de vol, peu près ce qu'on va avoir comme durée de vol, va se gonfler, enfin une sorte d'immense coussin qui va permettre de re-rentrer et de s'exposer aux températures de retour qui sont 2500-3000°C, et qui ont des vibrations fortes et des chocs.
Donc tout ça nous permet de commencer l'exploitation et de faire voler un composant clé de Rev1 qui est cette bento box.
Nicolas Gaume, est-ce que vous pouvez nous donner un exemple ou deux du fait que la microgravité permet de créer des choses, peut-être dans le cadre des alliages, qu'on ne peut pas fabriquer ou très difficilement sur Terre ?
Alors l'alliage c'est un bon exemple, si on mélange deux matériaux sur Terre, le plus lourd vers le bas, du fait de la gravité, le plus léger vers le haut, donc vous n'avez pas un alliage véritablement homogène.
Si vous faites la même chose dans l'espace, vous avez un bien meilleur alliage.
Après l'électronique, si vous voulez une salle blanche, du zéro à absolu, du vide, c'est complètement disponible à foison dans l'espace.
Mais là où c'est vraiment intéressant, c'est sans doute les sciences de la vie, parce que les changements d'état, gazeux, liquides solides sont plus marqués, les cellules souches se développent plus vite.
Et puis j'aurais tendance à dire que nous, avant de démarrer dans le développement de ces infrastructures, on a développé notre propre projet pilote.
L'idée c'était d'apprendre, l'idée c'était de réunir une équipe, c'était aussi l'idée d'avoir un projet dans les conditions du direct, si je puis me permettre.
Et on a vécu tout ce qu'est la vie d'un projet de A à Z.
En fait, on est la seule entreprise commerciale au monde qui a fait sur la station spatiale depuis 20 ans, un projet du début à la fin.
C'est un projet de l'idée, de la production jusqu'à la mise sur le marché.
Et on a développé spécifiquement deux variétés de vignes plus résistantes aux évolutions du changement climatique, plus résistantes face au mildiou, face au stracidrique, au stracetermique.
On s'est associé à un pépinialistoviticole, et on met cette vigne sur le marché l'année prochaine pour la vendre aux vignerons, qui auront une vigne bio plus résistante aux évolutions climatiques.
Et ça on a pu le faire grâce à l'infrastructure existante, l'ISS en particulier.
Et on a vu tout ce que l'espace pouvait permettre, donc on a conforté notre envie d'être dans ce secteur-là du marché.
Et en même temps, on a vu toutes les limites de ce qui existait, fondamentalement parce qu'elles tournent autour de l'être humain.
Et l'être humain, ça rend les choses beaucoup plus compliquées, et surtout beaucoup plus coûteuses.
Nicolas, vous ne l'avez pas précisé, mais vous avez donc envoyé dans l'espace, à bord de l'ISS, 12 bouteilles de Chateau Petrus Millésime 2000.
Elles ont passé 438 jours et 19 heures à bord de l'ISS.
Qu'est-ce qu'elles sont devenues ? Est-ce qu'il en reste ?
Et quel est le bilan du vieillissement de ce vin en orbite, en apesanteur ?
Alors, la mission qu'on a menée, c'est une mission sur le futur de la viticulture.
J'aurais tendance à dire que le projet cœur, c'est 320 plants de vignes qu'on a envoyés sur la Station Spatiale, moitié Merlot, moitié Cabernet Sauvignon, et avec des procédés très spécifiques, et une exposition à l'absence de gravité, on a amené ces plantes à évoluer de manière très rapide, très forte, et de créer une nouvelle variété, qui est revenue sur Terre et durable, et qui est une vigne bio plus résistante aux évolutions climatiques.
Clairement, ce projet-là coûte beaucoup d'argent.
Donc, on s'est posé la question de comment on le finance.
C'est là qu'on est tombés sur cette tradition bordelaise qui consistait, au XIXe siècle, de vieillir des bouteilles de vin sur des bateaux, ça s'appelait la cuvée Retour des Indes, et de grands châteaux du Médoc ont fait ces cuvées Retour des Indes, où on faisait vieillir des bouteilles de vin sur des bateaux.
Et on s'est posé la question de pourquoi pas moderniser cette tradition, et faire cette cuvée céleste, qui n'est pas une mince affaire, parce que, clairement, l'alcool est interdit sur la Station Spatiale, et les containers en verre également.
Donc, je vous laisse imaginer les immenses difficultés qu'on a eues, mais on y est arrivé, avec des protocoles, avec des conditions très particulières.
Et c'est aussi un moyen de financement, puisqu'on a vendu ces bouteilles très chères, à l'ordre d'enchères privées qu'on a faites il y a quelques années.
Très chères, c'est combien ?
On s'est engagé à ne pas pouvoir le dire, mais très chères.
Merci Nicolas Gaume d'avoir été une de nos voix de la tech pour notre 11e épisode.
A bientôt.
Merci Fabrice, merci Benjamin.
Merci Nicolas, grand plaisir, à bientôt.
C'est le moment du retour sur Terre pour l'épisode 11, Fabrice.
On a bien resté la tête dans les étoiles, mais même les plus beaux voyages ont une fin.
Et on vous donne bien sûr rendez-vous vendredi prochain, le 13 décembre.
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Même concept, même sommaire, même voix, mais avec des interviews en entier.
Merci à toutes et tous pour votre fidélité, à la semaine prochaine.
À la semaine prochaine, bye bye.
[Musique]